samedi 31 janvier 2015

XVe : Robe à Tassel - Partie 2/3 : Réalisation de la robe


Tout cela fait que je dois faire des choix qui ne sont pas forcément ceux utilisés dans la reconstitution historique. Pour autant, j’ai vraiment souhaité faire la recherche dans ce sens, afin de rester la plus logique et cohérente dans le but de m’éloigner le moins possible de la fameuse robe à tassel du XVe siècle.
Avant de rentrer dans les détails de la réalisation de cette robe (qui m’a fait avoir quelques crises de nerfs… Velours mon amour…), j’aimerais un peu vous parler de ma démarche de costumière.
J’admire énormément les personne faisait de la reconstitution historique, d’ailleurs tous les blogs, articles en parlant, que ça soit francophone ou anglophone, m’ont énormément aidé dans ma recherche préalable. Mais dans le rôle de la costumière de spectacle vivant, j’ai des contraintes qui ne sont pas forcément celles de quelqu’un travaillant pour lui-même : le budget (qui n’est pas le mien, mais celui de la cliente), le temps (qui coûte aussi de l’argent, et surtout, j’ai beaucoup d’autres commandes), la volonté de la cliente, etc.


Après avoir réalisé la cote, je suis passée à la robe d’apparat, la fameuse robe du dessus.
La robe à tassel a évolué au fil des ans. Si, en 1460, elle est ample à l’instar de sa grande sœur la houppelande, elle s’est de plus en plus ajusté au niveau du corsage et des manches. C’est cette forme, du début des années 1470 que nous avons choisi.
La robe à tassel est la plupart du temps taillée dans des tissus très riches car c'est un marqueur de société. Plus la robe est "chère", plus on montre sa richesse. Nous avons choisi un velours de coton taupe, plutôt qu'un brocard pour des questions de budget et d'entretien. Nous avons décidé de ne pas la doubler au niveau de la jupe, comme cela pouvait être le cas. Néanmoins pour protéger le corsage, il est doublé de coton ainsi qu’au niveau des manches (normalement du lin, mais question timing/budget, ça ne passait pas).

Scène de Bal XVe (Manuscrit de la Chanson de Renaud de Montauban) 

Il a fallu ensuite décider de la forme de l’encolure du dos et du système de fermeture. Cela a été la grosse problématique de cette robe.
           
- Quel type d’encolure à l’époque ?
A part rechercher et étudier le plus de visuels d’époque possible, il n’y a pas 36 solutions pour trouver la réponse. Néanmoins, ce n’est pas aussi évident que cela de trouver des visuels de ces dames de dos. L’excellent site Cadieux Mediumaevum a compilé un grand nombre d’images, il n’est malheureusement plus en ligne. Vous pouvez néanmoins le consulter depuis WayBack Machine (http://cadieux.mediumaevum.com/burgundian-gown.html)

Avant toute chose, il est important de préciser que la robe à tassel ne se ferme jamais dans le dos par un laçage, à l’instar de toutes ces consoeurs de la même époque ! Les laçages dans le dos n’apparaitront qu’au début du XVIe siècle (certes, seulement qu’une décennie après… mais tout de même !)
Il est clair que le dos n’est pas symétrique au devant, sinon comme tiendrait la robe au niveau des épaules ? De plus il n’existe aucun visuel d’un décolleté de dos aussi profond.
En général, cette encolure est arrondie, plus ou moins profonde, ou encore en un V profond mais très resserré au niveau de la nuque. Il y a dans tous les cas un revers de fourrure qui tombe en pointe ou en forme de Y.
Pour des raisons d’économie de fourrure (que nous avions en petite quantité), nous avons essayé de faire une petite forme en V, mais nous n’avions clairement pas assez pour laisser pendre ce revers.

Illustration : Marie Vibbert

Si notre dos n’a pas d’ouverture et la robe étant très ajusté juste au niveau du buste, il faut bien une ouverture pour laisser passer les épaules et/ou les hanches (on a testé, ça ne marche définitivement pas !). Après étude de plusieurs portraits et des toujours très bons documents des Marie(s) Vibbert et De Rasse, l’ouverture semble se faire milieu devant (au niveau de la pointe du décolleté) et se prolonge jusqu'au nombril. La fourrure descend parfois jusqu’au bout de cette ouverture (et donc dépasse de la ceinture), mais il semble que ce soit ou bien une évolution du temps, ou une question de goût. Dans notre cas, notre robe étant tardive et n’aimant pas ce détail, pas de pointe fourrée !

Quant au moyen de fermer cette ouverture, il n’est clairement pas apparent. On peut supposer une fermeture par agrafe ou par un lacet fermé bord à bord, dont els points d’accroches sont à l’intérieur de la robe. C’est cette dernière solution que j’ai choisie, ayant peur que les agrafes pas assez tendues ne s’ouvrent intempestivement.



Nous avons réalisé une ceinture de 7-8 cm de large afin de bien souligner la taille et d’affiner le buste. Elle était certainement à l’époque en cuir, ou bien en cuir recouverte d’un tissu pour lui donner la solidité nécessaire. N’ayant pas de cuir sous la main (et ne travaillant pas le cuir rigide), je l’ai réalisé en 2 couches de coutil épais, recouvert d’un très beau brocard de chez Sartor, acheté à Pontoise en 2013.

Nous avons fait réaliser une boucle en métal typique des ceinture de robe à Tassel, malheureusement, nous n'avons pas eu le temps de la fixer pour les photos. 

Boucle de Matthew de Bayley Heritage Castings réalisée sur demande

Enfin, nous avons décidé de la longueur de l’ourlet au dernier moment.
A l’époque, la traine arrière était très trèèèès longue afin de démontrer sa richesse. Le devant de la robe l’était également (jusqu’à traine à terre sur quelques centimètres), obligeant les dames à relever leur robe en exposant ainsi leur cote, ce qui était d’ailleurs un geste de coquetterie !


Pour des soucis pratique, nous avons préféré réaliser un ourlet sur el devant frôlant le sol afin que Clémentine puisse marcher sans risque. Pour derrière, nous avons laissé un ample traîne d'environ 1,50m.

Relevé de traîne obligatoire...

Voilà ! Notre recherche s’est en réalité étendue sur plusieurs jours, bien plus que ne semble le montrer ces articles. Mais clairement, je n’ai pas le temps d’en rédiger plus :'(
Au passage, même si le velours semble le plus beau choix, je précise également, que c’est une horreur à gérer. Toutes les coutures d’assemblage (au niveau de la jupe et du corsage) ont été réalisées à la main au point arrière, et solidifier par un point machine, une fois sure que ce fichu velours ne bougerait plus.


Place aux photos !! Prochain article : le Hennin qui n'en est pas un :)






8 commentaires:

  1. Félicitations ! C'est du très bel ouvrage !!

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  2. C'est magnifique ! Avez vous utilisé un patron en particulier ?

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    1. Bonjour :) Merci beaucoup !

      Non pas de patron, ou alors je les réalise moi même. Dans ce cas présent, le corsage de la robe a été réalisé par moulage et la partie jupe en tracé direct sur le tissu.

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  5. Bonsoir,
    J'aimerai faire une robe à tassel. Alors vous avez réalisé en premier la cote puis en second la robe d'apparat. Donc il n'y a que 2 "robes". Quel matière avez vous choisi pour la cote ?
    Et pour le tassel, avez vous opté pour le bustier ?
    Bonne soirée
    Jehanne :)

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  6. Bonjour,
    J'adore ce magnifique travail (sur lequel je suis tombée par hasard récemment) et je me demandais comment faisait-on les œillets des ceintures à cette époque.
    Bonne journée
    Maïka :)

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  7. Bonsoir, je reste admiratif de votre réalisation. Bravo pour le réalisme . ❤️👍👏

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